samedi 31 mai 2014

Crop factor, ISO et rapport signal sur bruit

La question de la taille des capteurs, leur technologie (CCD ou CMOS) et leurs performances relatives lorsqu'il s'agit de produire une image se rapprochant de celle produite par une pellicule 35mm n'a pas fini d'alimenter la controverse entre spécialistes : techniciens, photographes ou chefs opérateurs.





Pour preuve, cette vidéo postée sur YouTube, il y a deux semaines, par Tony Nothrup et qui, sous couvert d'explication de la relation entre facteur de crop, ISO et ouverture relative des objectifs, attaquait les principaux fabricants de matériel en leur reprochant des publicités plutôt mensongères sur les performances de leurs matériels. Exemple : un appareil récent de Sony, le RX10, livré avec son zoom Vario-Sonnar 8,8-73,3mm, soit 24-200mm en équivalent 24x36. Le RX10 dispose en effet d'un capteur de 13,2x8,8mm, ce qui explique l'importance du facteur de crop. Or, Sony annonce une ouverture constante à f/2,8 pour son zoom, alors que selon les calculs de Tony Northrup, celle-ci serait plutôt de 7,6 ! En effet, l'auteur explique que la focale est en relation directe avec l'ouverture, et comme la focale ici est déterminée par la taille du capteur, annoncer qu'un zoom 8,8x73,3mm a la même ouverture qu'un 24-200mm serait une pratique tendant à induire l'acheteur en erreur... Il reste qu'on se demande si l'auteur ne cherche pas tout simplement à imposer un point de vue car, après tout rien n'empêche Sony de produire une optique capable d'ouvrir à f/2,8 pour la plage de focale du RX10.
Le problème en fait concerne l'équivalence effectuée entre un objectif conçu pour un certain type de capteur et un autre objectif conçu pour un autre type de capteur. En effet, un zoom 12-35mm pour Micro 4/3 n'est pas équivalent à un zoom 24-70mm pour full frame ! Ceci devrait être évident pour tout le monde, mais cela n'empêche pas de produire un 12-35mm à f/2,8 constant. On n'aura tout simplement pas la même image qu'avec un capteur plus grand. L'autre question importante étant en fait celle de la sensibilité des capteurs puisque, pour obtenir une image "correcte" (non-bruitée) avec un Micro 4/3 il faudra rechercher à quelle valeur ISO cela correspond par rapport à un capteur 24x36mm par exemple. Il est certain que la mesure en ISO du Micro 4/3 sera beaucoup moins élevée que celle du 24x36. Mais dans quelle proportion ? L'auteur de la vidéo n'effectue que des évaluations empiriques, qui ne permettent pas d'obtenir des valeurs fiables et à peu près constantes. D'autres tests seront sans doute nécessaires, mais le problème soulevé montre que cette question est souvent traitée à la légère par les différents sites censés effectuer des tests sérieux sur les équipements photo et vidéo (voir ce qui est écrit sur focus numérique, par exemple) et que de nombreux photographes "amateurs" se font sans doute beaucoup d'illusions sur les performances réelles de leur matériel...


dimanche 18 mai 2014

Sony F5 et F55 versions ENG : la dernière tendance du broadcast ?

Sony, comme AJA ou Blackmagic et bien après ARRI, a semble-t-il compris que les utilisateurs des caméras à grand capteur n'allaient plus se contenter de filmer des fictions aux cadres soignés, dans un environnement contrôlé. La proximité d'évènements comme le Mondial du Brésil aidant, on a vu apparaitre au NAB 2014 des solutions permettant de transformer ces caméras, à l'origine conçues pour la fiction, en solutions pouvant apparemment convenir à des retransmissions sportives ou à des documentaires tournés en équipe légère.






Pour cela Sony avait présenté une monture épaule, pouvant se docker sur les caméras et les rendant du coup parfaitement opérationnelles pour des prises de vue effectuées à l'épaule. Le prix et la disponibilité de ces dispositifs seront annoncés très prochainement selon les officiels de la firme.
En parallèle, Sony annonce la disponibilité prochaine d'un adaptateur B4 pour ces caméras, dénommé B4-S16PL, qui leur permettra de tourner au format 2K, en agrandissant légèrement l'image projetée par une optique B4. Le cercle de l'image de cet adaptateur couvre l'image produite par le capteur de la F5-F55 en mode 2K Center-Scan. Sony annonce moins d'un diaphragme de perte en luminosité en raison du léger agrandissement produit par cet adaptateur et une distorsion optique négligeable.
Un autre adaptateur (en option), le LAFZPL12P est en fait un adaptateur FZ vers PL, muni d'un connecteur Hirose 12 broches pour l'utilisation avec des zooms B4. Cet adaptateur permet une communication bidirectionnelle entre la caméra et l'optique; l'iris, la focale et les métadonnées de mise au point sont simultanément affichés dans le viseur ; ces données sont enregistrées à travers la sortie SDI sous le protocole SMPTE RDD18. Par ailleurs, tous les contrôles de l'objectif deviennent opérationnels et le bouton RET peut recevoir une affectation.
Sony a également annoncé des cartes mémoires dans la nouvelle série A qui seront disponibles en 256 Go, 512 Go et 1 To (les deux dernières l'étant déjà). Ces cartes ont une vitesse d'écriture garantie de 2,4 Gbps. Une carte de 1 To enregistre environ 7.8 heures de vidéo 2K RAW en 24p, ou une heure d'enregistrement en HFR (High Frame Rate) en continu à 180 fps ou 48 minutes à 240 fps.
Enfin, Sony met aussi à disposition un kit d'upgrade qui permet de transformer une F5 en F55. Au final, on pourra récupérer le signal 4K live par les sorties HDMI et 3G-SDI. Prix et disponibilité annoncés en juin.






(D'après l'article de Peter Crithary sur Sony Community)

dimanche 11 mai 2014

Calcul scientifique, art numérique, jeux vidéo : vers une archéologie des médias

A noter sur ce thème une contribution de Thomas Dreher de l'Université de Munich, qui fait le point sur l'évolution des techniques de visualisation sur ordinateur, du calcul informatique scientifique aux jeux vidéos. A lire sur IASLonline. L'imagination scientifique a trouvé un terrain de jeu apparemment sans limite en réalisant un ensemble dans lequel sont incorporées des techniques issues de la mesure et de l'instrumentation électronique et des algorithmes dérivés de l'intelligence artificielle (ou, comme on disait autrefois : la cybernétique).
On commence donc à élaborer cette histoire des jeux vidéos et des nouveaux médias, qui possède des formes particulières même si, comme a pu l'écrire Lev Manovich, elle reste attachée à la grande geste de l'histoire du cinéma et de l'image animée.

Une console Magnavox de 1972, connectée à la télé. Les joueuses jouent à Tennis, un des douze jeux inclus dans le système

Le chapitre 4 du livre de Thomas Dreher, intitulé "Images in motion - Video Tools" a pour objet l'histoire des techniques vidéo et des artistes à l'origine de ce qu'on a appelé l'art vidéo. On pourra lire aussi l'article en 3 parties que j'ai consacré à ce sujet, sous le titre : "Au commencement était la vidéo".








La publication de l'intégralité du livre de Thomas Dreher (traduit en anglais) commence ici, avec un chapitre sur la cybernétique, pour tous ceux qu'une vue d'ensemble de l'histoire de l'informatique intéresse.


Ci-dessus, Norbert Wiener, "inventeur" de la cybernétique (couverture de "Cybernetics", 1962) et, à droite, Claude Shannon en train de manipuler "Thésée" dans le labyrinthe (1952).

mardi 6 mai 2014

Le GH4 de Panasonic meilleur qu'une RED EPIC ?

Le compte-rendu des tests effectués par  Luke Neumann et publiés sur le site nofilmschool, pose des questions intéressantes concernant le rendu en terme de résolution à la sortie du GH4 (REC709 ?) comparée aux sorties RAW de l'EPIC et du 5DMARKIII. Effectivement, le GH4 donne des images plus nettes et donc apparemment une meilleure définition. Mais il s'agit d'un flux vidéo obtenu après débayerisation et interpolation. Il est donc possible que le traitement interne chez RED et Canon-Magic Lantern soit minimal et que tout le travail soit laissé à la post-production.
D'autre part, il n'est pas question du type d'enregistrement effectué en sortie du GH4 : à partir de la sortie HDMI 10 bits (donc YCbCr 4:2:2 en Rec709) ou enregistré directement sur carte ou bien encore en utilisant une sortie HD-SDI par l'intermédiaire du boitier d'interface DMW-YAGH.
On comprend donc que Panasonic, pour obtenir son 4K ou Ultra-HD effectue l'essentiel du traitement dans le boitier, alors que RED effectue ce travail en post-production.
Par ailleurs, l'auteur fait remarquer qu'il y a une différence importante entre la résolution comprise comme "détail" et la "netteté" (sharpness) d'une image. Les images peuvent paraitre très nettes en raison du traitement sur les contours, sans pour autant que la caméra soit capable d'enregistrer des détails aussi fins. La résolution d'un système de prise de vue (caméra ou photoscope) est donc avant tout fonction de sa capacité à reproduire les détails les plus fins d'une image et non pas du traitement effectué après le bloc de prise de vue (optique + capteur).
Organisation d'un filtre de Bayer
Ensuite, bien sûr, il y a la qualité des algorithmes de débayérisation (ou dématriçage pour les puristes). Dans le meilleur des cas, ils sont capables de reproduire 80% des détails fins d'une image, ce qui signifie qu'un capteur affichant une résolution de 4K ne sera pas, a priori, meilleur qu'un capteur affichant 5K ou plus. Du moins en termes de reproduction de ces détails.
Au final,  cependant, on peut comprendre l'attrait que représente un appareil capable de délivrer une image 4K directement exploitable en sortie de l'appareil, sans avoir à recourir à de longs traitements en post-production. Même si pour cela il faut réaliser des compromis en termes de compression, par exemple.